"Sculpting the Senses", l'époustouflante exposition d'Iris van Herpen au MAD Paris !

Explorant la mode avec une approche disruptive et pluridisciplinaire, Iris van Herpen à travers son exposition "Sculpting the Senses" questionne sur un monde qui mute de manière exponentielle. Subtile harmonie entre savoir-faire traditionnel et technologique, la créatrice visionnaire nous fait voyager dans son univers luxe côtoyant l'art contemporain et les sciences naturelles. Une immersion au coeur d'un parcours passionnant parmi des chefs d'oeuvres oniriques trônant au Musée des Arts Décoratifs de Paris. Une découverte culturelle mode fascinante cultivant le sens dans une filière souvent qualifiée de superficielle...


Le Musée des Arts Décoratifs de Paris
Le Musée des Arts Décoratifs, lieu incontournable de savoir et de culture à Paris

Paris capitale de la mode, ville au rythme effréné où pensée, art et mode se cultivent dans un bouillon hétéroclite. On aime Paris ou on la déteste, superficielle ou savante, Paname en langage argotique vieillit désignant "ville énorme" est le lieu de tous les possibles avec ses illusions et ses désillusions. Patrimoine riche chargée en histoires, la capitale dite "ville lumière" éclaire de nombreux savoirs avec ses structures comme les fondations, les musées où siègent de magnifiques expositions. Sciences, botanique et histoire naturelle, art et vernissages, mode, luxe, défilés et haute couture, cette ville, oeuvre d'art vivante offre une pléthore de sorties culturelles à part entière où l'on s'y perd parfois car toutes intéressantes selon les domaines. Mode et Paris sont des synonymes où le savoir-faire d'excellence ne déroge pas à la règle avec notamment de grandes maisons de haute couture rayonnant à l'international. Quelque fois la ville accueille des maisons insolites de mode ancrées dans le luxe et c'est le cas d'Iris van Herpen ; avant-gardiste dans l'âme qui explore l'essence de la matière à travers des collections qui envoûtent et que l'on qualifie de chefs-d'oeuvre...


"Sculpting the Senses" ou Sculpter les Sens est une exposition des oeuvres de la maison néerlandaise de haute couture Iris van Herpen qui rend hommage à la créativité multi-dimensionnelle et étonnante de sa créatrice. Naviguant entre différents thèmes et montrant les savoir-faire pluridisciplinaires allant du traditionnel artisanat à la pointe de la technologie de cette enseigne somptueuse ; cet événement se tenant au MAD Paris ouvre de nouveaux horizons à l'exploration de la mode ultra luxe. Une aventure culturelle à part entière qui nous fait nous questionner sur la beauté des éléments à travers la retrospective de créations fantasmagoriques issues de la maison Iris van Herpen.




Iris van Herpen, quand la mode rencontre l'art contemporain et les sciences naturelles

Portrait de la créatrice Iris van Herpen par Robin de Puy
La créatrice Iris van Herpen
crédit photo : Robin de Puy pour Volkskrant magazine

Le 5 juin 1984 à Wamel ville située dans la province de Gelderland au Pays-Bas, naquit sous le signe du gémeaux, l'alchimiste de la mode Iris van Herpen. Très tôt bercée par un paysage artistique qu'est la nature et influencée par le monde de la danse classique et contemporaine qu'elle pratiquait par l'initiation de sa mère qui était professeure ; le chemin de la petite Iris semblait tout tracé où son rêve était de devenir danseuse étoile. Elle s'exprimait également à travers la peinture et le violon. Attrait pour l'art en premier lieu, intéressée par les matériaux, elle s'approcha de la mode afin de trouver la réponse aux contraintes quant à la fluidité des mouvements du corps lors de la pratique de danse. Le rapport au corps et au vêtement pris donc une ampleur d'ordre artistique chez elle et elle intégra l'ArtEZ Hogeschool voor de kunsten d'Arnhem (les majuscules représentant les trois villes où est située l'université que sont Arnhem, Enschede et Zwolle) afin d'étudier le design de mode. Pendant ses études en 2005, direction Londres où elle fit un stage enrichissant et en pleine effervescence afin de préparer la Fashion Week Parisienne au sein du pôle styliste chez qui l'on surnomme "l'enfant terrible de la mode britannique" qui n'est autre que Alexander McQueen. Travaillant autant sur les imprimés que sur la machine à coudre puis sur des broderies, entre recherches et inspirations aux musées ainsi que dans des librairies, elle proposa ses échantillons et aida à réorganiser l'atelier de la maison. En 2006, elle décrocha son diplôme en présentant ses créations intitulées "Machine Jewellery"Après ses études, elle s'octroya une pause en voyageant pour se recentrer et mieux se concentrer sur son art. Elle se forma par la suite auprès de l'artiste et designer textile néerlandaise Claudy Jongstra à Amsterdam qui utilise des couleurs et textures naturelles. Avant de créer sa marque Iris van Herpen en 2007, elle travailla dans la conception de chaussures chez United Nude. S'ensuivit, une première collection en tant qu'invitée à la Fashion Week d'Amsterdam intitulée "Fragile Futurityaprès avoir été contactée par une agence de presse ; ce qui la fera se distinguer en marquant les esprits de par son travail innovant et singulier sur le textile (elle réitérera pour 2008, 2009 et 2010). Elle présentera également ses collections lors de la Fashion Week de Londres (2009 et 2010). Son talent et sa vision à la fois transversale et pluridisciplinaire lui a valut de multiples récompenses tels que :


❖ Dutch Fashion Media Awards
(Dutch Design Awards, 2009)

❖ Dutch Design Awards
(Best Product of Fashion and Accessory
Dutch Design Awards, 2009)

❖ Rado Young Designer Awards
(Dutch Design Awards, 2010)

❖ Dutch Fashion Incubator Awards
(Dutch Design Awards, 2010)

❖ Dutch Fashion Accessories Awards
(Dutch Design Awards, 2010)

❖ Mercedes-Benz Dutch Fashion Awards
(Dutch Design Awards, 2010)

❖ Prix de la Mode
(Best Dutch Designer, Marie Claire, 2013)

❖ Golden Eyes Awards
(Dutch Design Awards, 2013)

❖ Dutch Design Awards
(Category FashionDutch Design Awards, 2013)

❖ Han Nefkens Fashion on the Edge Awards
(Han Nefkens Fashion on the Edge Awards, 2014)

❖ ANDAM Fashion Awards
(Association Nationale pour le Développement des Arts de la Mode2014)

❖ Prix de la Mode
(Best Dutch Conceptual Designer, Marie Claire, 2015)

❖ Prins Bernhard Cultuurfonds
(Cultuurfonds Mode Stipendium2016)

❖ Grand Prize of the European Commission 
(STARTS Prize ~ Prize for Innovative Collaboration "Artificial Skins and Bones" 
& Prize for Artistic Exploration "Magnetic Motion" - European Commission, 2016)

❖ Prize Witteveen+Bos 
(Exhibition "Iris van Herpen - Metabolic" - Art+Technology, 2016)

❖ Grand Seigneur Awards
(Dutch Fashion Award, MODINT, 2017)

❖ Johannes Vermeer Award 
(Dutch National Prize, Dutch Government, 2017)

❖ Women of the Year International Award 
(2019)

❖ Honorary Doctorate
(University of the Arts London, 2022)

❖ Chevalier des Arts et des Lettres
(French Ministry of Culture, 2023)

❖ Savvy Awards
(Innovation and CreativitySavvy Awards, 2024)


En 2011, La Chambre Syndicale de la Haute Couture à Paris l'intègre en tant que membre invité et elle présenta sa collection "Capriole" lors de la Semaine de la Haute Couture (elle sera présente également en 2012 et 2013). Toujours en 2011, l'une de ses créations qu'est la robe Escapism en impression 3D a été saluée par le Magazine Time en la désignant comme l'une des 50 meilleures inventions de l'année. Consécration en 2012 avec le Groninger Museum (Pays-Bas) qui lui attribue une exposition compilant ses oeuvres et mettant en avant son travail situé entre haut-niveau artisanal et technologique. C'est aussi sa première exposition, mais aussi fait très exceptionnel, l'une des rares artistes à voir de son vivant une retrospective de ses créations ! D'autres monuments remplis d'art et d'histoire lui ont ouvert leurs portes afin d'exposer ses créations tels que le Metropolitan Museum of Art et le Cooper-Hewitt Museum à New York, le Victoria & Albert Museum à Londres ou encore le Palais de Tokyo à Paris et bien d'autres... Dont le Musée d'Histoire Naturelle à Paris qui a accueilli sa collection "Ludi Naturae" en 2018. Elle lança sa collection de prêt-à-porter qui est selon elle "une extension de la couture, adapté pour la vie quotidienne [...]." nommée "Phy-tha-go-rash" en 2013. De "Capriole" (AW 11/12) à "Seijaku" (AW 16/17), puis de "Sensory Seas(SS 20) à "Architectonics" (AW 23) la dernière née, IVH explore la mode en remodelant ses contours avec des collaborations très fructueuses issues de divers corps de métiers.



La complémentarité des disciplines font donc naître chez Iris van Herpenexploratrice de la matière, des désirs à la compréhension de ce qui l'entoure. Ainsi, corps scientifique (biologiste, ingénieurs, chimistes,...) et artistes (plasticien, architecte, designers,...) s'allient avec ce génie de la mode qui sait cultiver les savoirs et l'intelligence collective dans chacune de ses multiples collaborations afin de transgresser allègrement le vêtement et ses normes. Dans son laboratoire de création mêlant pléthore de talents et techniques, la mode en cohabitation avec le savoir-faire artisanal se digitalise avec des procédés à la pointe de la technologie créant ainsi des structures et effets originaux. Tout se transforme avec Iris van Herpen où l'immatériel franchit le monde matériel afin de donner vie à son univers stylistique si singulier. Le regard tourné vers le futur, vers une mode plus responsable, elle n'hésite pas à s'affranchir du conventionnel en utilisant des matières inconcevables jusqu'alors, recyclables et des bio-matériaux innovants. Sculpteuse de silhouette féminine dont l'empowerment au féminin tient une place centrale dans ses créations, elle collabore avec des femmes inspirantes venus d'horizons divers en passant par la musique (Björk, Lady Gaga, Jennifer Lopez, Rosalía, Beyoncé...), du cinéma (film Black Panther, Scarlett Johansson, Eva Green, Cara Delevingne, Gwendoline Christie...). Elle habille également des stars à des événements (Festival de Cannes, Met Gala, Golden Globe Awards, Vanity Fair Oscar Party, Grammy Awards...) ou encore la reine Máxima des Pays-Bas, collabore sur de nombreux projets (costumes pour le New York City Ballet et l'Opéra de Paris, Rolls Royce, Dom Pérignon, le Centre de Biodiversité Naturalis...). Elle compte également à son actif plusieurs ouvrages avec "Iris van Herpen" du Groninger Museum, puis "Iris van Herpen Transforming Fashion" du High Museum of Art d'Atlanta, et "Iris van Herpen" avec Wetheveen+Bos. Récemment, elle célèbre le mariage avec ses créations sur-mesure ou pour d'autres occasions avec sa griffe particulière. Iris van Herpen, étudie, explore, touche, réutilise, révolutionne, transforme et transcende la mode en art un peu comme le ferait feu Antoine Laurent Lavoisier...



Sculpting the Senses, immersion dans l'univers disruptif d'Iris van Herpen

Exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD de Paris
Exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD de Paris

Axe historique de Paris placée entre le 1er et le 4ème arrondissement, à proximité du jardin des Tuileries, la rue de Rivoli accueille le MAD où se tient du 29 novembre 2023 au 28 avril 2024 l'exposition de Iris van Herpen "Sculpting the Senses". Présentée dans l'une des plus imposantes galeries du musée et entièrement rénové, cet espace mode nommé Christine et Stephen A. Schwazerman (noms des mécènes ayant permis la rénovation) ; on y traverse les différentes thématiques qui y sont abordées gravitant autour de l'univers de la maison IVH :


■ L'eau et les rêves

■ La vie des profondeurs

■ Les forces du vivant

■ Le squelette incarné

■ La dynamique des structures

■ Synesthésie

■ Atelier alchimique

■ Cabinet de curiosités

■ Mythologie ténébreuse

■ Nouvelle nature

■ Voyage cosmique



L'art et la science sont liés : ils questionnent tous deux la vie.

Iris van Herpen



Véritable épopée sensorielle et visionnaire autour du corps et parmi plus d'une centaine de pièces iconiques, on évolue au sein des 11 thèmes avec une composition aux effets sonores conçue par l'artiste Salvador Breed. Ainsi, tous les sens sont en éveil parmi des sculptures contemporaines (Philip Beesley, Collectif , Wim Delvoye, Rogan Brown, Kate MccGwire, Damien Jalet, Kohei Nawa, Casey Curran et Jacques Rougerie) et des oeuvres de designers (Neri Oxman, Ren Ri, Ferruccio Laviani et Tomáš Libertíny) où les artistes sont mis en lumière avec des éléments naturels (fossiles, coraux...) à côté des créations haute couture d'IVHCette exposition est le fruit de multiples personnes et organismes travaillant dans l'ombre dont la commissaire et conservatrice au département moderne et contemporain Cloé Pitiot avec ses assistants Louise Curtis, Mathurin de Jonchères et Joffrey Picq. Certains donateurs, amateurs ou professionnels de l'art et de la mode voir du monde du cinéma ont largement contribué à cette exposition avec tout d'abord Lizzie et Jonathan Tisch, couple business américain impliqué dans l'art, la mode, le luxe et les hôtels. Puis, Lauren Amos à la tête de ANT/DOTE une market place de choix à Atlanta offrant des pièces de marques de luxe et aussi de WISH pour les sneakerheads ; elle conseille aussi les fondations dans le domaine de l'art en siégeant au conseil d'administration du High Museum of Art toujours dans cette ville de la Georgie. Jordan Roth, artiste, créateur et producteur new-yorkais appartenant au monde du théâtre, est une figure de Broadway et des défilés de haute-courue a également contribué à cet événement. Soutien infaillible, Les Amis des Arts Décoratifs ont aussi permis à la réalisation de cette exhibition culturelle ; sans compter sur l'appui de l'Ambassade du Royaume des Pays-Bas. En collaboration avec Hans Boodt Mannequins fournisseurs et producteurs de mannequins de vitrine de haute qualité, les créations habillent donc ces derniers. Enfin, la scénographie a été effectuée par l'Agence NC spécialisée dans l'architecture intérieure et le graphisme par Agnès Dahan Studio.



L'eau et les rêves

L'eau et les rêves, première thématique issue de l'exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD Paris
L'eau et les rêves, exposition "Iris van Herpen Sculpting the Senses" au MAD Paris

"  Liquide, solide, gazeuse, l'eau apparaît régulièrement dans les créations d'Iris van Herpen, jusqu'à devenir le sujet principal en 2010 de la collection "Crystallization". Composant majeur du corps humain, elle surgit de ses robes pour transcender ce flux invisible qui constitue notre essence. À toutes les échelles, goutte de pluie comme tsunami, allégorie poétique comme porte des ténèbres, harmonie comme chaos, sous forme d'écume, de liquide cristallisé ou d'ondes, elle convoque l'imaginaire foisonnant de la créatrice. Bulles suspendues dans l'espace, éclaboussures transparentes, brume, vagues turquoise ou outremer, les oeuvres aquatiques d'iris van Herpen révèlent les mystères et les pouvoirs métamorphiques de l'eau qui se manifestent à travers tout un éventail de matériaux et de techniques, allant du verre soufflé au plexiglass thermoformé, de la découpe laser au Suminagashi, technique japonaise de dessins marbrés à l'encre. "


L'eau est fascinante de par bien des façons, vitale en étant une ressource, elle inspire l'art et la mode et cela se ressent dans les créations d'Iris van Herpen. De ses états empruntés et retranscris sur les oeuvres, la créatrice offre une vision onirique de cet élément notamment à travers des procédés uniques avec des matières comme le plexiglass ou encore du verre. J'ai été vraiment surprise des techniques employées qui frisent l'époque futuriste et donc avant-gardiste s'appliquant dans le domaine de la mode. La première chose qui a attiré mon regard est cette imposante sculpture de vagues noires mystiques représentant le macrocosme de l'océan par le Collectif Mé qui donne le ton sur le sujet abordé. Prouesse technique et optique poussée à son paroxysme, espace-temps arrêté un moment pour contempler le jaillissement de l'eau, la tech-mode se retrouve sur la robe Water de la collection "Crystallization" de 2011 (photographie en bas à gauche). L'eau est donc immortalisée via une technique de plexiglass thermoformé. La robe nommée Frozen Falls munie de sa coiffe est issue de la collection datant de 2018 "Syntopia" (photographie en bas à droite), est faite à partir de tissu provenant de la firme japonaise Komon Koubou maniant l'art ancestral du textile, de tulle, de film polyester (mylar) et d'organza ; où elle recréée à merveille entre ondes et vagues les mouvements de l'eau. Cohabitation avec d'autres artistes rendant plus étroit ce lien entre l'art et la mode, ce premier thème côtoie les oeuvres se composant de trois pièces dénommé Origins (2018) de l'artiste canadien contemporain Daniel Spriggs. On y retrouve donc des figures représentant une forme ovale avec des éléments telles des particules, une femme, puis la séquence de l'ADN peintes et semblant flotter sur des transparents superposés dans des vitrines. Ici, la genèse prend tout son sens. 



La vie des profondeurs

La vie des profondeurs, deuxième thématique issue de l'exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD Paris
La vie des profondeurs, exposition "Iris van Herpen Sculpting the Senses" au MAD Paris
(Collection 2020 - " Sensory Seas")

" Sous la surface des océans demeure un monde invisible à l'oeil nu mais pourtant fondamental à la vie sur Terre. En 2020, dans sa collection "Sensory Seas", Iris van Herpen s'empare de cet écosystème et du bestiaire planctonique, et à plus large échelle, des animaux marins pour dessiner des lignes et les textures et les textures de ses robes. Les êtres unicellulaires et la famille des hydrozoaires, dont les méduses, incarnent continuellement un ensemble des plus inspirants pour la créatrice. Ils constituent des références primordiales qui lui permettent de dévoiler l'insaisissable pour donner vie à ses vêtements. Comme les maîtres-verriers du XIX siècle Léopold et Rudolf Blaschka ont permis l'accès à ce monde invisible grâce à leurs étonnants modèles pédagogiques, Iris van Herpen s'empare des mêmes sujets pour les transposer, entre artisanat et nouvelles technologies, dans l'univers de la haute couture. "


Méduse, rascasse, faunes et flores abyssales siégeant dans les abîmes des mers et océans souvent invisibles à l'oeil nu mais si essentiel à l'écosystème d'ordre planétaire ; sont subtilement mis en évidence de par un jeu où le volume et la matière sont harmonieusement mêlés. On retrouve des robes architecturales avec des motifs et caractéristiques empruntés aux créatures océaniques qui m'ont de suite interpellé. Des oeuvres d'art où la technologie s'est de nouveau immiscée comme pour la robe Hydrozoa qui se met en mouvement de la collection 2020 intitulée "Sensory Seas" (première photographie en haut à gauche) et où le tissu en organza de verre ressemblant aux nageoires du Pterois Volitans semble être en lévitation par des filaments de PETG, un copolymère souvent utilisé pour les impressions 3D. La robe Hydromedusa de la même collection (photographie en bas à droite) faite en tulle, en mylar (film polyester), en organza puis en tissu issu de la firme japonaise de textile Komon Koubou utilisant des techniques traditionnelles ; vient plonger le visiteur aux tréfonds des fosses océaniques. Les couleurs sont aussi très parlantes avec des camaïeux de bleus propres aux étendues marines et les effets miroirs sur les tissus, invitent à descendre dans les profondeurs pour y découvrir un biotope évoluant en toute discrétion et à l'abri de la surface.



Les forces du vivant

Les forces du vivant, troisième thématique issue de l'exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD Paris
Les forces du vivant, exposition "Iris van Herpen Sculpting the Senses" au MAD Paris

"  La fascination d'Iris van Herpen pour les formes issues de la nature, l'a amenée à réfléchir à la morphogénèse et aux forces créatrices aux origines du vivant. L'infiniment petit s'est imposé pour lui révéler la beauté d'êtres invisibles et lui ouvrir la voie à des grammaires esthétiques et à des matérialités nouvelles. Elle s'est passionnée notamment pour les planches illustrées du biologiste Ernst Haeckel qui mirent en lumière au XIX siècle les êtres microscopiques. Mêlant les arts et les sciences, elle explore des terrains terrestres ou marins et pour en décrypter les architectures et les textures. Dans un corps-à-corps avec la faune et la flore, les robes fusionnent progressivement avec celles qui les portent. Sa préoccupation pour la préservation de l'environnement l'incite à éveiller notre regard sur le monde comme dans sa collection "Earthrise", en collaborant avec l'artiste Rogan Brown, où elle choisit de magnifier le plastique recyclé. "


Exploration de l'univers microscopique avec ses autoroutes de mycélium ou encore voyage au centre du moléculaire, Iris van Herpen s'inspire de l'infiniment petit du monde de la biologie afin de l'apposer en agrandissant son microscope sur ses créations. Issue de la collection de 2012-2013 intitulée "Hybrid Holism" qui doit son inspiration à la doctrine de l'hylozoïsme (principe philosophique où toute matière est animée, vivante au sein d'elle-même où agissant pour un niveau supérieur, voir pour plus grand qu'elle telle que l'Anima Mundi décrite par l'Âme du Monde) ; la création Symbiosis Dress (photographie en haut à gauche) inspirée du plancton et de certaines structures biomécaniques, mêlant architecture et monde arboricole a été conçue en collaboration avec l'architecte autrichienne Julia Koerner. La technique en impression 3D utilisée est celle de la stéréolithographie mammouth où en synthétisant au maximum le processus, le polymère liquide durcit sous les rayons laser... Rien que ça ! Ainsi du micro au macro, en collaboration également avec l'artiste britannique Rogan Brown travaillant avec le papier comme support en le sculptant ; on observe ses oeuvres aussi exposées telles que Choral Ghost Variation (photographie en haut à droite). On retrouve ainsi en collaboration avec cet artiste des créations très surprenantes avec la robe Magnétosphère issue de la collection "Earthrise" en 2021 (photographie en bas à gauche et située le plus à droite) que l'actrice américaine Hailee Steinfeld a porté lors du MET Gala (Metropolitan Museum of Art) de New York la même année. Cette robe est faite en matière recyclée de plastique ainsi que de débris jonchant les fonds marins que l'association de protection des océans Parley for the Oceans ont ramassés. Là où la science fusionne avec l'art, on retrouve bien plus qu'un cours de Science et Vie de la Terre qui est transposé cette fois-ci dans l'univers de la mode. Mais ce que je retiens tout particulièrement, c'est qu'entre conscience écologique et mode, l'alchimiste Iris van Herpen vient aussi mettre en garde sur la santé de notre planète.



Le squelette incarné

Le squelette incarné, quatrième thématique issue de l'exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD Paris
Le squelette incarné, exposition "Iris van Herpen Sculpting the Senses" au MAD Paris

"  Cabinets de curiosités et galeries d'anatomie sont des creusets fertiles d'inspiration pour Iris van Herpen. Comme Michel-Ange ou Jean-Antoine Houdon qui étudiaient par le biais des écorchés les représentations anatomiques de l'humain, la créatrice analyse squelettes mais aussi muscles, tissus, fascias et réseaux pour proposer plus qu'un vêtement, une peau neuve à ses collections. Ses robes, structures hybrides, deviennent projection de notre constitution intrinsèque, fiction d'un corps renouvelé. Exploitant les frontières entre le vivant et l'inerte Iris van Herpen redonne vie à la silhouette. Le vêtement, mutation d'anatomies complexes se dessine alors tel un corps en extension. Elle met ainsi en lumière et en perspective ce qui ne se devine qu'à travers la faible transparence de la peau ou le génie de la machine. Elle pratique l'IRM artistique, la radiographie créative des structures de la vie. "


Planche anatomique, étude du vivant en faisant une escale au coeur des structures, l'alchimiste-créatrice Iris van Herpen vient exploiter l'architecture osseuse, la matrice et les éléments organiques et inorganiques pour insuffler la vie à ses créations subjuguantes. Première pièce que le musée a acquis, l'Ensemble Crystallization issue de la collection "Crystallization" de 2010 (photographie en haut à gauche) se composant d'une imposante pièce en polyamide faite en impression 3D et de sa jupe en nylon et éco-cuir ; a été créée en collaboration avec l'architecte et designer britannique Daniel Widrig. Cette création fut le premier pas que Iris van Herpen fit vers les nouvelles technologies telles que l'impression 3D et les collaborations avec des architectes, scientifiques, designer... S'ensuivit d'autres créations comme la robe Skeleton issue de la collection "Capriole" s'inspirant du saut en parachute en 2011 (photographie en haut à droite) qui fut ainsi créée de toute pièce en collaboration avec l'architecte, designer et matérialiste belge Isaïe Bloch. Cette dernière a été faite entièrement via la technique de frittage sélectif par laser (Selective Laser Sintering) consistant à prototyper rapidement par méthode additive en impression 3D avec du polyamide. C'est parmi des squelettes d'animaux vertébrés pour mieux expliquer son processus créatif que les robes sont exposées comme dans un musée d'histoire naturelle...



La dynamique des structures

La dynamique des structures, cinquième thématique issue de l'exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD Paris
La dynamique des structures, exposition "Iris van Herpen Sculpting the Senses" au MAD Paris

"  Grâce à son approche holistique, Iris van Herpen s'intéresse à l'existence de toutes les structures qu'elles soient naturelles ou artificielles, organiques ou architecturales. Le corps devient le composant d'un tout, relié à sa physicalité mais aussi à son esprit et à son âme. Elle puise dans les singularités du vivant pour en extraire des écosystèmes, des processus de croissance, des interconnexions. Les champignons, à eux seuls un des règnes du vivant, composent ce monde à part, tissé d'enchevêtrements de filaments de mycélium, qui séduisent Iris van Herpen tant par la beauté de leurs réseaux que par l'intelligence de leur système génératif. Ode à la nature, ses collections comme "Roots of Rebirth" sont un hommage à cette toile organique inframince et souterraine. Célébration du gothique flamboyant, sa Cathedral Dress réinvente les codes du vêtement. "


Architectures artificielles ou naturelles, rien n'échappe à l'oeil créatif d'Iris van Herpen qui regarde à la loupe les enchevêtrements du vivant ou que l'homme a façonné afin de créer sa propre mode scientifique. Cathedral Dress (photographie en haut à gauche et la plus à droite) issue de la collection "Micro" (2012), en est le témoin avec sa structure dite artificielle qui transparaît à travers les styles gothique et baroque. Architecturale, telle une charpente, qui cette-fois-ci au lieu d'être au sein du corps l'enveloppe, cette création montre le lien d'interconnexions complexes bâti par l'homme. En collaboration avec Isaïe Bloch (architecte, designer et matérialiste de nationalité belge) puis avec l'entreprise louvaniste Materialise NV située en Belgique spécialisée dans le domaine de l'impression 3D, de logiciel et la conception de pièces ; la robe en polyamide a subi un traitement par bain de galvanoplastie avec du cuivre pour lui donner cet effet brunissant caractéristique du boisQuant à la robe Ovidius (photographie en bas à gauche) venant de la collection "Meta Morphism" (2022), on est plutôt sur des variables géométriques semblables a ce que la nature créée avec à la fois des structures fluides et arrondies (organza de soie et tulle), puis rigides rappelant les armatures de certains vertébrés (polyamide imprimé en 3D et cuivre). Ici, la structure est donc décortiquée sous toutes les coupes afin de donner vie à des robes dignes de monuments et empruntant les codes encore une fois à l'organique et à l'inorganique. Côtoyant les robes d'Iris van Herpen, on retrouve également le sacré structural et le courant néo-gotique dans l'oeuvre d'art Nautilus Penta créée en 2013 (photographie en bas à droite) et travaillée au laser dans de l'acier inoxydable par l'artiste plasticien belge Wim Delvoye (le même artiste qui a été au coeur d'un scandale artistique avec ses sept cochons tatoués).



Synesthésie

Synesthésie, sixième thématique issue de l'exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD Paris
Synesthésie, exposition "Iris van Herpen Sculpting the Senses" au MAD Paris

"  Si la matérialité du corps, son anatomie et ses réseaux entrent en résonance avec les créations d'Iris van Herpen, d'autres dimensions de l'être la fascinent et l'inspirent. L'intérêt qu'elle porte au cerveau et plus particulièrement à la synesthésie ou aux phénomènes complexes des états modifiés de conscience, comme le rêve lucide ou l'hypnose, lui permet d'étirer les frontières de la mode au-delà de la simple perception visuelle ou de l'expérience tangible du vêtement. Fascinée par la neurologie, elle cherche à susciter le trouble, à magnifier les sens, à les sculpter par les matériaux qu'elle choisit. Comment diluer les frontières de la perception ? Comment stimuler le cerveau à travers les cinq sens et comment les associer les uns aux autres pour provoquer une nouvelle expérience émotionnelle ? "


Géométrie hypnotisante, déformation visuelle avec effet d'optique, perturbation sensorielle... Entre réalité et irréalité, matérialité et immatérialité, Iris van Herpen brouille les pistes et met les sens, sens dessus dessous en explorant à sa manière créative la neurologie. La robe Dichotomy de la collection de 2019 intitulée "Hypnosis(la troisième en haut à droite) donne du fil à retordre à nos sens avec la technique ancestrale japonaise du Suminigashi (représentant l'encre flottant sur l'eau) où de fines lignes blanches sont imprimées sur de la soie. Ces dernières sont reliées au mylar par un procédé thermique puis découpées au laser (par ondes contrapositives). Une fois les motifs sculptés, ils sont pressés sur des panneaux d'ondes thermiques de soie noire et cousus sur du tulle fin à la main donnant cette illusion d'optique entre forme et volume créant ainsi un contre-mouvement. Quant à la robe Epicycle de la même série que la création précédente (en bas à gauche) inspirée de l'oeuvre tridimensionnelle et cinétique du sculpteur américain Anthony Howe nommée "Omniverse" qui est la base de cette collection ; est agencée avec des sphères d'organza en multicouche révélant sa lumière. Ici, la créatrice s'interroge sur le lien entre la surface et la substance avec des patterns empreints d'illusions, et aussi sur la relation avec la nature au cycle de vie oecuménique (universel). Hypnotisant à souhait, mode scientifique et prouesse technique, Iris van Herpen tient du génie qui vient ajouter son grain d'innovation dans ses créations structurales. Les oeuvres de la créatrice sont disposées autour de ce monument en noyer massif avec des finitions en chêne, sculpté, gravé et finement ciselé nommé Good Vibration Cabinet (2013 pour l'entreprise italienne Fratelli Boffi) par Ferruccio Laviani, designer italien envoûtant les sens.



Atelier alchimique

Atelier alchimique, septième thématique issue de l'exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD Paris
Atelier alchimique, exposition "Iris van Herpen Sculpting the Senses" au MAD Paris

" L'Atelier alchimique rend hommage au parcours d'Iris van Herpen à travers la présentation de centaines d'échantillons spectaculaires réalisés en collaboration avec de nombreux artistes, architectes, designers et scientifiques. Révélant les multiples processus employés par la créatrice, ces éléments sont tout autant issus de nouvelles technologies que des savoir-faire artisanaux"


Échantillons, collaborations avec des artistes, scientifiques et architectes révélant des matériaux divers et très variés, matériel digne d'un laboratoire avec microscope, tout ici passe au crible de l'alchimiste de la mode Iris van Herpen. Lien entre la texture et la matière, détails et perspectives, on observe tout le travail et la recherche où l'on y explore également les formes et les couleurs. Les sens du toucher et de la vue sont en émoi. Telle une mosaïque, on étudie sous toutes les coutures un panorama de motifs, une exposition infinie qui ouvre le champs des possibles pour relier les éléments et créer d'une toute autre manière. Le processus créatif est à demi dévoilé et l'on se place en tant que narrateur omniscient d'une histoire créative qui paraît sans fin. Ou du moins, jusqu'à avoir fait le lien entre tous ces précieux artefacts, qui, une fois agencés, assemblés, donnent vie à des merveilles. On parcourt les carnets de croquis et au fil des pages, on comprend la manière et où veut en venir Iris van Herpen pour ses créations. Le temps semble rester en suspension, on croirait s'y perdre parmi toutes ces éprouvettes, ces tubes de tests, mais on est en réalité, comme absorbé dans cet atelier qui montre l'envers du décor en termes de multitude de choix pour manufacturer des oeuvres hybrides. Entre techniques ancestrales et traditionnelles puis technologiques, le courant néo-futuriste ne rôde pas si loin dans cette pièce qui ne s'apparente en rien à celle d'un laboratoire vieux jeu appartenant à un savant fou ; mais à un atelier où l'on plonge dans la créativité pure. Iris van Herpen nous montre à travers son prisme, les prémisses de la quintessence de son art.



Cabinet de curiosités

Cabinet de curiosités, huitième thématique issue de l'exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD Paris
Cabinet de curiosités, exposition "Iris van Herpen Sculpting the Senses" au MAD Paris

" Conçu à la manière d'un cabinet de curiosités du XXI siècle, cet espace reflète les multiples sources d'inspiration d'IVH. Hétéroclite, cet ensemble révèle sa soif de découverte, son appétence pour des disciplines proches comme radicalement éloignées de la mode, son goût pour la richesse et la diversité de ce qui nous entoure. Représentation encyclopédique de sa carrière, ce cabinet synthétise son foisonnement créatif, son approche holistique, sa force à générer des connexions entre les mondes. "


Histoire de l'art, sciences, techniques... autant de savoir savamment exhibés tel le veut ces étranges pièces du XIX siècle qui regorgent d'artefacts venus de pays lointain, entre mythes et légendes, objets de convoitise et livres aux savoirs immémoriaux. Après l'Atelier Alchimique, on passe au concret avec des matières fusionnant comme par magie en se retrouvant parmi des curiosités qui y sont méticuleusement entreposées. Ainsi, voilant et habillant la face, les spectaculaires accessoires de tête, nous emmènent directement au sein du règne des insectes (en haut à droite) avec le masque Cross Pollination de la collection "Synesthesia" (2011) accompagné du bijou de visage Aiquoarea appartenant à la collection "Sensory Seas" (2020). O.V.N.I prenant place dans cette galerie, les chaussures Hacking Infinity (en haut à droite) issue de la collection de prêt-à-porter automne-hiver 2015 du même nom (le prêt-à-porter Iris van Herpen a été arrêté en 2016) ont été conçues en collaboration avec l'artiste contemporain et designer de chaussures japonais Noritaka Tatehana (qui a commencé à créer des robes et des chaussures à l'âge de 15 ans seulement). Cette paire en porte-à-faux se munie en guise de semelle de grappes de cristaux en résine SLA (stéréolithographique) et photopolymère imprimé en 3D avec la collaboration de la marque avant-gardiste de chaussures United Nude et l'entreprise américaine 3D Systems. Les lanières de cuir de vache habillant la chaussure ont été découpées au laser puis disposées à la main. Une curiosité entre artisanat et procédé de pointe pour des chaussures vertigineuses dignes d'un univers SF. Robes et autres accessoires singuliers jonchent les emplacements et nourrissent l'encyclopédie Iris van Herpen.



Mythologie ténébreuse

Mythologie ténébreuse, neuvième thématique issue de l'exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD Paris
Mythologie ténébreuse, exposition "Iris van Herpen Sculpting the Senses" au MAD Paris

"  Native du village de Wamel, proche de Den Bosch, la ville du peintre flamand Jérôme Bosch, Iris van Herpen a grandi en examinant avec intensité les figures fantastiques de l'artiste, mêlant alchimie, mysticisme et allégories. Elle en garde un goût certain pour l'hybridation et le foisonnement questionnant pareillement la nature animale et la nature humaine, les fusionnant en des êtres chimériques. À travers ses découvertes faites dans les collections du Embassy of the Free Mind, à Amsterdam, et dans les cabinets de curiosités que l'histoire de l'art a mis en lumière, elle explore les émotions de la peur à l'intérieur de ces mondes imaginaires. Les ressources littéraires des périodes symboliste et surréaliste, lui permettent aussi d'exploiter la métaphore comme un prisme d'expression, renouvelant dès lors les typologies conventionnelles de la mode. Des Métamorphoses d'Ovide à la mythologie japonaise, elle aime réinterpréter les mutations de notre monde. "


Inspirante et moralisatrice, la mythologie quelque soit les nations, explore tous les domaines de la vie, exprime les sentiments, dissèque les émotions et les ressentis, observe les comportements et se calque sur la réalité. Vérité, proverbiale... Épopées et quêtes, déités et humains, elle enrichit les cultures mais aussi la mode dont Iris van Herpen en tire les sources pour s'affairer dans son atelier. Aux côtés d'un costume de samouraï, ces deux robes ci-contre proviennent d'une des premières collections d'Iris van Herpen nommée "Capriole" en 2011 dont la collection s'inspire de la cabriole "saut en l'air" et plus précisément d'un saut en parachute où corps et esprit sont face à des extrêmes existentiels. À l'origine, trois oeuvres réalisées à la main que sont ces robes, composent la série Chemical Crows conçues en 2008 par Iris van Herpen qui fut fascinée dès son plus jeune âge par les oiseaux et ayant élevés des choucas (le Corvus Monedula est une espèce de la famille des corvidés cousins des corneilles et des corbeaux). Inspirée par ces êtres à plumes intelligents qui ont un attrait pour les objets scintillants, riches de symbolisme de par les versants mystique, secret et magique voir alchimique ; la créatrice transforma le noir (corbeaux) en or (baleines de parapluies) tout en se rapprochant de la silhouette de ces créatures plumées. Elle y ajouta également des fils dorés industriels en les superposant afin d'évoquer les phanères propres à ces animaux. Telles des armures revêtant le corps, Iris van Herpen joue avec les matières et les structures. Volumineux et volatile à souhait !



Nouvelle nature

Nouvelle nature, dixième thématique issue de l'exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD Paris
Nouvelle nature, exposition "Iris van Herpen Sculpting the Senses" au MAD Paris

"  Dans de nombreuses collections, les silhouettes d'Iris van Herpen, habillées de lignes de vie, viennent célébrer un nouveau concept de nature futuriste. En présentant des perceptions d'un avenir imaginaire, elle questionne avant tout les distinctions entre nature et artifice face à une société aspirée et fascinée par la présence croissante du virtuel. Mettant à l'épreuve la présence physique du corps dans un monde post-humain, la créatrice invite à observer une société de plus en plus en interversion. Dans les collections "Syntopia", "Escarpism" et "Voltage", elle interroge les liens étroits entre sciences et technologies. Fascinée par le monde de demain, Iris van Herpen fusionne les disciplines, les tissent les unes avec les autres, pour donner naissance à une nouvelle définition de la mode. Le vêtement, métamorphosant le corps en être hybride, incarne dès lors une vision futuriste de notre monde. "


Osmose avec le vivant, décomposition du mouvement (chronophotographie), hybridation des techniques pour donner corps aussi bien à la mode qu'au mouvement, l'exploratrice Iris van Herpen vient métamorphoser le vêtement d'une façon singulière. Devant l'imposante créature spectaculaire nommée Daphné de l'artiste américain Casey Curran (créée en 2020 à l'occasion de la Paris Fashion Week pour Iris van Herpen en 2022) munie d'un moteur afin de lui insuffler du mouvement, faite en laiton, en feuille d'or, acrylique, film polyester (Dura-Lar®) et matériel de fixation (Flex-Seal®) ; se dresse la robe finale (ci-dessus) portant la même dénomination que la collection "Syntopia" (2019). Étienne Jules-Marey, physiologiste, médecin, scientifique et inventeur français passionné par la locomotion (humaine et animale) qui créa le fusil photographique afin de décomposer le mouvement est donc la muse de Iris van Herpen pour sa robe. Cette dernière est le fruit de la technique "Inside a second" en collaboration avec Studio Drift composé des artistes néerlandais Ralph Nauta et Lonneke Gordijn souvent nommés " les chorégraphes du futur". Ici, le vol d'oiseau est donc observé à la milliseconde où Iris van Herpen prit les fractions de secondes ralenties afin de briser le drapé du tissu et créer une superposition évoquant une plume. Ces motifs sont ensuite traduit sur une multitude de couches d'organza transparents et bicolores qui sont par la suite découpées au laser pour être reliées par procédé thermique avec du mylar puis du coton. On passe donc avec cette oeuvre possédant l'architecture d'une plume, du mouvement ralenti à l'accéléré.



Voyage cosmique

Voyage cosmique, onzième et dernière thématique issue de l'exposition "Sculpting the Senses" de Iris van Herpen au MAD Paris
Voyage cosmique, exposition "Iris van Herpen Sculpting the Senses" au MAD Paris

"  Iris van Herpen montre, à travers l'exploration du cosmos, combien elle manie l'art de la synthèse, s'inspirant tout autant des dernières découvertes que de l'histoire des arts et des sciences, des cartes anciennes d'Andreas Cellarius que des images du télescope James Webb. Le cosmos et ses mystères entretiennent son imaginaire et avivent sa créativité. Métaphore de son approche holistique, ils incarnent un espace de déploiement sans limites, symbole d'une liberté absolue. Les couleurs flottent, s'animent et offrent de nouveaux horizons pour les corps en lévitation. Appréhender le cosmos, c'est pour elle bouleverser l'ordre des choses et prendre de la hauteur. Le monde devient un tout au-delà de la seule planète Terre. Il ne se développe plus de bas en haut ou de haut en bas mais dans toutes ses dimensions, comme un multivers, sans plus de frontières si ce ne sont celles de l'esprit et de son imaginaire, de l'âme et de ses voyages cosmiques. "


Cosmogonie, objets célestes, exploration du quantique avec la théorie des cordes ou encore l'espace-temps avec celle des boucles... Entre gravité et non-pesanteur, nous voici projeté dans le multivers d'Iris van Herpen, monde parallèle où horizontalité et verticalité se dissolvent avec ses créations défiants toutes les lois de la physique. La combinaison Singularity issue de la collection 2022 nommée "Meta Morphism" (en bas à gauche), appelée également Magnum Vegan Dress, a été initialement créée pour mettre en avant la gamme végétalienne de glaces de la marque Magnum® ; où elle fut portée par le top model et activiste français Cindy Bruna. C'est auprès du studio néerlandais Klarenbeek & Dros (composé du duo depuis 2024 de Eric Klarenbeek et de Maartje Dros) que la collaboration Magnum® x Iris van Herpen eut lieu, et où la bio-technologie combinée à l'écologie donna naissance à l'éco-technologie dans le domaine de la mode. Fusion entre le cacao et le vêtement, inspiré du mythe tragique grec de la nymphe Daphné et du dieu Apollon qui exprime le moment où la nymphe se transforme en laurier ; cette création à la haute technicité et aux fins détails a été fabriquée à partir de matériaux organiques tels que des algues et surtout d'enveloppes de fèves de cacao. Ces dernières ont été traitées afin d'obtenir un biopolymère utilisable en filament pour l'impression 3D Selective Laser Sintering (ou SLS) afin de rendre possible la réalisation de cette robe haute-couture cosmique. Quant à Fractal Flows, robe de la collection "Sensory Seas" (2020) avec sa forme médusoïdale challengeant les volumes, elle a été confectionnée en collaboration avec l'artiste américain émerveillé par les océans Perry Hall (Perry Hall Studio). Utilisant comme médium pour ses oeuvres envoûtantes la peinture qui danse des chorégraphies artistiques avec le comportement de cette dernière ; il y combine des forces dynamiques naturelles avec entre autres la turbulence, la réaction chimique ou encore la thermodynamique... Une fois sa peinture en pleine métamorphose capturée basée sur son Meristem Drawing (procédé de film vivant où l'on voit opérer la transformation d'huile et d'acrylique), les motifs sont imprimés en transparence sur de l'organza en verre sphérique qui est ensuite lié en multicouches de manière thermique à du coton noir (dendrites lasercut 3D). La robe se compose également de tulle et la créatrice a aussi fait appel à Komon Koubou manufacture japonaise de tissus. Une merveille océanique naquit !



C'est en parcourant l'un de mes magazines fétiches mode & luxe que je suis tombée sur cette exposition... Étant très fan du travail d'Iris van Herpen, je ne pouvais manquer cette occasion de découvrir tout son univers si proche du vivant et de l'art venant harmonieusement se mêler dans la mode version haute-couture. Aussi, je souhaitais créer une occasion d'aller visiter cette exposition en m'y rendant et c'est pendant mon (long) séjour parisien que je suis partie à l'aventure ; et croyez-moi je n'en suis pas déçue ! J'ai été littéralement subjugué et transporté dans un voyage empreint de mystique avec des créations oniriques qui semblaient prendre vie de par un travail architectural, structural avec la combinaison de matériaux autant traditionnels que futuristes ; et un jeu de volume puis de dimensions qui viennent à tromper l'oeil. Mouvance des éléments que l'on retrouve dans la nature en micro, on s'en éloigne de par une approche macro, parfois surréaliste, le travail d'Iris van Herpen est spectaculaire. Cela m'a aussi fait me questionner sur ce qu'est réellement la mode, son sens, sa superficialité, sa profondeur, comment on l'explore et l'aborde. Ce qui est sûr, c'est que cette maison va bien au delà de ce qui est proposé habituellement avec en ligne de mire le Pourquoi adoubé d'un travail admirable ! J'ai également fait un petit tour à la boutique de la MAD où l'on retrouve pas mal d'objets déco, de la papeterie, des accessoires mode, des bijoux... Mais surtout une sélection d'articles issus de l'univers d'Iris van Herpen avec le catalogue de l'exposition (65€), le sac Fuguku Mini Ruby point (49,95€), le tote bag Babe avec un motif éponyme de la maison (19,90€) dont j'ai failli succomber, la ceinture Nautilus (995€) et bien d'autres... Je vous laisse découvrir cette exposition à travers mon réel sur Instagram® :






Iris van Herpen fascine et hypnotise avec cette alchimie des matières, cette symbiose moléculaire entre les volumes et une technicité à la fois artisanale et technologique. Hymne à la science, ode à la nature, hommage au corps humain, la Maison IVH a le don de nous emmener dans son monde onirique et cosmique qui est le sien. Du micro à la macro, cette exposition sensibilise également avec une pointe d'avant-gardisme à la beauté fragile des éléments qui nous entourent... Vous pouvez suivre les actualités de cette maison de haute couture ainsi que du Musée des Arts Décoratifs de Paris sur leurs Instagram® @irisvanherpen et @madparis, puis sur leurs pages Facebook® Irisvherpen et MAD Paris.



Connaissez-vous la maison de Haute Couture Iris van Herpen ?


Avez-vous déjà visité le MAD Paris ?


Auriez-vous aimer découvrir cette exposition ?










Photos retouchées (montage et recadrage)

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